Première éolienne française produisant de l’électricité (1887-1890)

Première éolienne française produisant de l’électricité (1887-1890) Ensemble documentaire constitué notamment des expériences de Charles Marie Michel de GOYON (1844-1930), 3e duc de Feltre . Le premier en France à s’intéresser concrètement à l’électricité éolienne. Le projet initial et son promoteur Charles-Marie-Michel de GOYON (1844-1930), 3e duc de Feltre (1864), étudie le droit avant de se lancer dans une carrière diplomatique puis politique. Élu député en 1876, il quitte la scène politique nationale, mais pas locale, en 1885. Nous ignorons tout de ses motivations à s’investir dans des expérimentations scientifiques. Est-ce mercantile ou est-ce « un grand seigneur qui s’amuse à faire de la science« ? Quoi qu’il en soit et n’étant pas un homme de science, il s’entoure d’hommes compétents. C’est d’abord l’ingénieur Raoul Louis Joseph de L’ANGLE BEAUMANOIR (1855-1899). En juillet 1886, le duc de Feltre le charge d’étudier la construction « d’un moulin à vent…qui ferait tourner une dynamo dont le courant chargerait des accumulateurs« . Une fois chargés, ces accumulateurs devaient être loués à des particuliers. Ne parvenant pas à cet objectif auprès des particuliers, les deux hommes s’adressent au ministère des Travaux Publics. Ils proposent et obtiennent de fournir l’électricité, emmagasinée dans des accumulateurs, nécessaire à l’éclairage d’un des phares du Cap de la Hève sur la commune de Sainte-Adresse près du Havre. Le « Système de la Hève » C’est d’abord un  » moulin à vent » ou plus exactement une éolienne multipale du modèle « Halladay« . D’origine américaine mais perfectionnée et construite à Castres par l’entrepreneur et ingénieur François Ignace SCHABAVER (1834-1911). Elle repose sur une charpente en bois et cette dernière sur un soubassement en maçonnerie. L’installation électrique se trouve dans un bâtiment en bois attenant à l’éolienne. Elle comprend deux dynamos Brush, de type Victoria (Victoria dynamos), permettant la charge d’accumulateurs. Le montage s’effectue sous le contrôle de l’ingénieur mécanicien de l’École centrale des Arts et Manufactures, Léon VIGREUX (1837-1891) . Il se termine dans les premiers jours de septembre 1887. Emporté une première fois par une tempête le 30 octobre, le moulin est refait presque en entier conformément aux instructions de Léon VIGREUX. Expédié au Havre le 22 mars 1888, son montage s’achève le 3 mai 1888. Malheureusement une seconde tempête, le 23 janvier 1890, détruit à nouveau le moulin. Cette seconde destruction met un terme à l’expérience en raison des couts de réparation que ni le constructeur SCHABAVER, ni le duc de Feltre ne veulent assumer. Il s’ensuit un procès entre les deux hommes dont le jugement est en faveur de François Ignace SCHABAVER (1834-1911). Peut-on parler d’un échec ? C’est assurément non. D’une part, l’éclairage du phare de la Hève est effectif pendant les périodes de fonctionnement de l’éolienne. Ensuite comme l’écrit Etienne ROGIER, la première éolienne française produisant de l’électricité du duc de Feltre ouvre la voie dans ce domaine : « Elle n’a donc pas très bien fonctionné, ce qui est de toute façon compréhensible parce que c’était une première. Cependant, on peut dire que ce fut un essai beaucoup plus important que ceux de Blyth ou Brush, puisque pratiquement tous les aérogénérateurs qui allaient être construits par la suite, jusqu’aux années 20, allaient être sur le même modèle, …« . Les causes de l’arrêt de l’expérience sont d’ordres technique et financier. « Technique » car pour un service régulier et rentable de l’éclairage du phare, il était nécessaire de disposer d’un nombre « considérable d’accumulateurs« . Or « Le prix de ces appareils est encore trop élevé pour qu’une semblable opération soit économique. Elle ne le deviendra qu’à l’heure, prochaine peut-être, ou des accumulateurs à bas prix pourront exister (1892)« . Financier ensuite puisque le Duc de Feltre assume financièrement seul son expérimentation. Pour celle-ci, l’Etat n’offrit que la location gratuite du terrain du cap de la Hève. Les incidents mineurs ou majeurs dont les deux tempêtes du 30 octobre 1887 et du 23 janvier 1890, entrainent des couts financiers tels que l’expérience ne peut être poursuivie. L’ensemble documentaire La majorité des relevés et observations sont de l’ingénieur électricien des Arts et Manufactures, Charles VERNIER. A quel titre participe t-il à cette expérience ? Nous l’ignorons mais nous savons qu’il est l’un des ingénieurs travaillant pour le duc de Feltre. A en juger par la nature des documents qu’il rédige, nous pensons qu’il avait la charge des appareils enregistreurs (dynamomètre, voltmètres et ampèremètres enregistreurs, et des relevés. L’ensemble documentaire se compose de : – « Feuille d’expériences » (roses et vertes) du 17 au 23 janvier, veille de la destruction de l’éolienne (feuilles avec déchirures, marges abimées,…) – Plus d’une centaine de feuilles (format bordereau) d’enregistrement avec annotations en volts ( quantité d’électricité produite par l’éolienne et la dynamo ?) – Un fasicule très endommagé de quatre pages et un plan titré « MOULIN A VENT SYSTEME AMERICAIN DE M. HALLADAY CONSTRUIT PAR M. F.I SCHABAVER… » – Six feuillets d’enregistrements du vent pour la période du 18 au 21 janvier. – Un recueil de cinq mini dossiers , d’avril 1889, de trois ou quatre pages chacun dédiés aux appareils enregistreurs: « Anemocinémographe », « Anémomêtre Robinson », « Dynamomêtre », « Volts-mêtres » et « Ampères-mêtres ». Trois des cinq dossiers propose une petite photographie sur sa page de couverture. – Le diplôme obtenu par le duc de Feltre lors de l’exposition universelle de Paris de septembre 1889 . Diplôme où figure la mention manuscrite « Moulin à vent ». (Forts plis, salissures, défauts en marge) Sources principales : Etienne ROGIER, L’électricité éolienne de la Belle Epoque à EDF dans CAHIERS D’EOLE novembre 2000 N° 2 et Électricité, revue scientifique illustrée, N°1, avril 1892 pages 185 à 189.

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